Interview

Maison GLAZ : la formation en tiers-lieu

Une fabrique joyeuse de littoral en transition

28 février 2024

Premier d’une série, cet article s’attache à sonder comment la formation professionnelle en tiers-lieux permet de mieux saisir les dynamiques sociales en transition qui se tissent localement entre acteurs politiques et acteurs issus des écosystèmes tiers-lieux.

La maison GLAZ est située sur un hectare et demi de parcelles à l’entrée de la rade de Lorient à l’extrémité du plus grand cordon de mer de Bretagne. Un lieu très concerné par le changement climatique, cette presqu’île pourrait bien devenir un jour une île d’ici la fin du siècle. Cet enjeu climatique induit de nouveaux projets au sein de ce tiers-lieu autour d’un axe “formation” dans le domaine de la résilience territoriale pour une montée en compétences localement.
Interview de Mme Akira Lavault, Co-directrice de la Maison Glaz – presqu’île de Gâvres, Morbihan).

Pouvez-vous nous dire ce que signifie glaz en Breton ?

C’est la couleur indéterminée de la nature en Breton, donc ce n’est ni un bleu, ni tout à fait un vert, ni tout à fait un gris ou un marron, c’est le nuancier de toutes ces couleurs que peut prendre la nature. Cela illustre bien notre lieu.

Pourriez-vous nous rappeler la genèse de votre structure ?

C’est une structure hybride qui s’appuie sur une colonie de vacances de l’armée qui a été préemptée par la mairie et nous avons signé une convention d’occupation du domaine public avec la mairie. Nous sommes une entreprise d’insertion, c’est un projet qui existe depuis 5 ans et nous sommes organisme de formation depuis 2022.

Cette dynamique autour de la formation était donc déjà présente avant l’appel à projet DEFFINOV ?

L’axe formation, nous l’avons lancé en préfiguration en 2021 puisque nous avons été lauréat de Fabriques de Territoire proposant ainsi des formations à destination des porteurs de projets de tiers-Lieux. On avait établi que l’une des manières de pouvoir pérenniser notre modèle économique serait probablement d’assurer des formations. 

Au travers de l’appel à projets DEFFINOV, quel était l’enjeu principal pour la Région Bretagne ?

Le cadre national DEFFINOV qui soutient le développement de la formation dans les tiers-lieux est porté en Bretagne par la Région lui permettant ainsi un rapprochement entre le milieu de la formation et les écosystèmes des tiers-lieux pour mieux ancrer les formations dans les territoires. La Région a des relations fortes avec de nombreux acteurs locaux, mais du point de vue des tiers-lieux c’était la première fois qu’il y avait un financement dédié. Elle s’en est saisie pour pouvoir mettre un pied dans la politique Tiers-lieux. La Région avait jusqu’alors réalisé des actions en faveur des tiers-lieux sans que celles-ci ne soient coordonnées.

Au travers de l’appel à projet DEFFINOV, quel est l’objectif principal de votre structure ?

Pour notre structure, ce dispositif permet de ramener et de former des forces vives localement, de faire la courte échelle aux porteurs de projets. De poser aussi sur le territoire des briques de compétences. C’est peut-être ce genre d’emplois sur des nouvelles filières qui vont nous permettre d’avoir un littoral durablement habitable. 

Pouvez-vous nous préciser quelles sont les particularités de vos actions de formation ?

Je vais prendre comme exemple la formation « Développer un tiers lieu de transitions » d’un volume de 49 heures. Cette formation est basée sur l’alternance de théorie et de mise en pratique à travers des cas individuels et des ateliers collectifs, sur une pédagogie expérientielle : immersion à Maison Glaz et des partages croisés d’expérience. Ce qui est important, ce n’est pas tellement ce qu’on est, mais ce qu’on y fait, comment on le fait et les effets que l’on produit sur le territoire. Avant DEFFINOV, on avait déjà des touches avec différents écosystèmes localement, mais DEFFINOV nous a permis de faire la jonction entre ces différents écosystèmes. Le projet de création d’une école de la résilience du littoral sur des métiers de la transition écologique est né de la volonté de plusieurs acteurs locaux et cette école est adossée à l’Université Bretagne Sud et à l’agence locale énergie-climat ce qui nous permet de poser quelque chose de très concret sur l’impact territorial. Ce projet fait la connection entre projet d’insertion professionnelle et formation.

Pouvez-vous nous préciser, selon vous, qu’apporte de plus au territoire le fait de développer des actions de formation au sein de votre structure ?

Cela permet de proposer des formations à destination des porteurs de projets de tiers-Lieu, donc de faire de l’accompagnement pair-à-pair. Par exemple, la formation “Développer un tiers-lieu de transitions” vise à outiller les participants en leur faisant explorer, construire et expérimenter les facteurs de soutenabilité de leur tiers-lieu sur le long terme. 

Quel est l’impact du dispositif « DEFFINOV » sur votre structure ?

C’est compliqué d’expliquer ce qu’est le projet de tiers-lieu et quel est son impact sur le territoire. On y voit un café, des hébergements, des gens qui font la fête, un potager et un atelier qui ressemble à une déchetterie de l’extérieur. Rendre un peu la chose publique et collaborer avec l’Université Bretagne Sud et l’Agence Locale Energie-Climat nous assure une légitimité. Cela nous permet aussi d’asseoir notre crédibilité et d’être regardés différemment par les pouvoirs publics. On verra si cela conduit à des collaborations plus intenses maintenant avec des collectivités locales.

Votre tiers-lieu est-il rattaché à un réseau national ou dans un ancrage territorial régional ?

Nous sommes membres de l’association nationale des tiers-lieux. Il existe un réseau régional, c’est Bretagne Tiers-Lieux, basé sur le partage, l’échange, l’entraide, avec un projet et toute une dynamique propre. C’est une association au départ constituée entre différents lieux. J’y suis très attachée. Ce sont des gens qui ont tous grandi ensemble, on s’entraide beaucoup. Bretagne Tiers-lieux a joué un rôle très actif dans l’appui aux lauréats DEFFINOV puisqu’il y a tout un dispositif d’accompagnement.

Entre la Région et la maison Glaz, les relations ont-elles changé ?

Cela a permis de tisser des liens opérationnels, donc c’est intéressant. Tout reste à construire, nous n’en sommes qu’au début.

Cet article est publié en Licence Ouverte 2.0 afin d’en favoriser l’essaimage et la mise en discussion.