De l’urbanisme temporaire au pérenne… il n’y a pas qu’un pas ! Pendant 10 ans, l’association belge Communa a ouvert et géré des dizaines de lieux de vie, a animé des communautés d’habitants, d’artisans, a fait vivre ces tiers-lieux. Pendant 10 ans, Communa a également fermé certains de ces lieux et travaille aujourd’hui pour pérenniser et sanctuariser ces espaces communs en ville. Ce chemin, de l’occupation temporaire au pérenne, de nombreux collectifs de tiers-lieux et d’acteurs dits de « l’urbanisme transitoire » l’empruntent désormais en France, mais aussi ailleurs en Europe. Maxime Zaït, cofondateur de Communa et chercheur à la Vrije Universiteit Brussel, revient dans cet entretien sur les évolutions connues par Communa et d’autres collectifs en Europe vis-à-vis des enjeux relatifs à la propriété.
La propriété apparaît aujourd’hui comme l’un des enjeux importants rencontrés par les tiers-lieux, tout du moins les collectifs cherchent-ils à bénéficier de conditions de location sécurisantes pour développer leurs projets. Après de premières expériences de squats, ou d’occupations temporaires, comment la question de la propriété s’est-elle posée aux membres de Communa ?
Je suis justement en train d’écrire un texte exactement sur ce sujet pour raconter comment à Communa nous avons évolué depuis plus de 10 ans et pourquoi nous en sommes venus à nous poser cette question de vouloir devenir propriétaire de nos lieux. Nous avons commencé par l’idée de vivre en communauté. C’était ça, le point d’entrée. Nous étions en étude et nous avions besoin d’un espace. Nous avions peu de moyens et donc des difficultés pour trouver un lieu. Mais en soi, nous n’avions pas d’avis particulier sur la propriété, c’était un impensé. Et puis, nous avons rencontré un peu par accident des squatteurs qui nous ont expliqué avoir transformé l’essai du squat vers une occupation temporaire. Ils nous ont expliqué comment ils entraient dans un bâtiment, cassaient la porte, s’installaient et ensuite négociaient avec le propriétaire pour obtenir une convention. On s’en est inspiré pour créer l’association Communa, avec l’idée de proposer à des propriétaires la mise à disposition temporaire de leurs immeubles vacants, sans passer par la case squat justement.
Mais aucune institution ne voulait nous confier leurs bâtiments vides pour des occupations temporaires, parce que Communa n’était pas encore connue et qu’on était très jeunes. Ça s’est imposé à nous : il fallait un rapport de force avec les propriétaires pour faire bouger les choses. Alors nous sommes passés par le squat, un peu à contrecœur. Nous étions globalement assez mauvais pour ça et nous avons surtout collectionné les mésaventures. Par chance, on a fini par rencontrer un promoteur immobilier flamand qui avait racheté une tour de bureau de 8000 m2 dans le quartier de l’université. Il s’était déjà fait squatter des bâtiments dans le passé et il l’avait vécu de manière positive. Voir son bâtiment occupé, c’était finalement un win-win pour lui, alors il a été séduit par la proposition de Communa d’occuper son bâtiment. Nous avons signé une convention pour notre premier bâtiment pour une durée de neuf mois, ce qui est très court. Mais en neuf mois, nous avons complètement transformé le bâtiment, un skatepark, une salle de fête énorme, des festivals qui ont duré trois jours, des ateliers d’artistes, des hébergements.
Nous avons ensuite ouvert un deuxième bâtiment, et un troisième… et à la fin de nos études, nous avons décidé de développer Communa et d’en faire un projet professionnel, pour ouvrir des espaces pour de plus en plus de monde. Avec les fondateurs du départ, nous avons travaillé pour transformer cette initiative en un projet d’économie sociale et solidaire, en gardant le format associatif. Nous avons conventionné plusieurs bâtiments et nous avons gardé cette logique des communs que nous ne connaissions pas à l’époque comme principe théorique, mais qu’on appliquait dans la pratique. Nous avons lancé beaucoup d’occupations temporaires, d’abord des petits lieux d’activité, puis des logements sociaux vides que nous avons reconvertis en hébergements pour des personnes sans-abri, et enfin des centres d’accueil en semi-autonomie pour des réfugiés. Aujourd’hui, Communa c’est près de 50 salariés et une dizaine de sites en gestion à Bruxelles qui permettent d’héberger plus de 300 personnes.
Dans cette histoire, il y a eu des lieux qui ont ouvert… et des lieux qui ont fermé. Au début, on trouvait ça rigolo, on se disait que ça faisait partie du jeu cet aspect éphémère. Mais à un moment, ça devient fatigant. Parfois, les projets immobiliers « classiques » qui suivaient nos occupations temporaires ne s’avéraient pas aussi sociaux que ce qu’on espérait. On aimerait qu’un projet avec des valeurs sociales s’installe, mais derrière il n’y a que la valeur économique de captation du loyer qui l’emporte dans la « vraie vie », gérée par le « vrai droit de propriété ». Alors nous nous sommes demandé s’il n’y avait pas un moyen de faire autrement, de faire perdurer les logiques qu’on avait mises en place dans les bâtiments, mais sur des temps longs ? Une première étape, c’était l’urbanisme « transitoire », c’est-à-dire que nous espérions insuffler des dynamiques sociales et positives pendant la phase temporaire, qui allaient être conservées dans les phases « définitives » du projet. L’idée c’était que grâce à l’occupation temporaire de Communa, il y aurait ensuite des adaptations par le propriétaire sur le projet définitif : une salle commune en plus, ils vont garder la petite bibliothèque, etc. Des petites victoires, mais ça ne nous satisfaisait pas.
Alors, nous avons entendu parler des Commuty Land Trust (CLT) Les Community Land Trust sont des structures immobilières nées aux États-Unis dans les années 1970 pour dissocier la propriété du foncier de l’usage de l’immobilier. Grâce à ce dispositif, les ménages détiennent des baux de longues durées pour l’usage d’un logement à des tarifs modérés., puisque nous travaillons avec eux à Bruxelles. Nous avons occupé plusieurs bâtiments que le CLTB (Community Land Trust Bruxelles) https://cltb.be/ allait développer. C’est une super initiative : quand Communa s’en va après quelques années d’occupation temporaire, les lieux restent dans le giron du commun sous un format anti-spéculatif.
Pour conclure, je résumerai le positionnement de Communa vis-à-vis de la propriété de la manière suivante. Tout d’abord nous avons été contre la propriété, ou plutôt il est possible d’identifier une phase d’absence de questionnements, nous sommes tentés par le « contre » la propriété avec le squat. Ensuite, il y a eu une phase que j’appelle la mise « entre parenthèses » de la propriété, ou « en dehors » de la propriété, avec l’utilisation de l’occupation temporaire comme outil qui permet ça d’une certaine façon. Mais la propriété finit toujours par nous revenir dans la figure comme un boomerang, donc la troisième étape a été de jouer le jeu, mais en essayant de « hacker » la propriété. D’une certaine manière, l’idée c’est de retourner le droit de propriété contre lui-même, un peu comme un praticien du jujitsu qui utilise la force de son adversaire. Dit autrement, on cherche à amputer la propriété de sa composante individuelle, privée et lucrative, en utilisant des véhicules juridiques existants, pour fabriquer de la propriété d’usage, collective, non spéculative.
Est-ce que l’urbanisme temporaire ou transitoire, sa reconnaissance, voire son institutionnalisation, a joué un rôle dans l’émergence des enjeux vis-à-vis de la propriété qui se posent aujourd’hui aux tiers-lieux ? Est-ce un mouvement partagé par d’autres collectifs à l’échelle européenne ?
L’urbanisme temporaire nous a permis de nous rendre compte qu’il faut aller plus loin, parce que, oui, c’est bien beau d’occuper temporairement, mais c’est comme ça, le ver est dans la pomme, c’est temporaire ! Mais il est important pour moi de préciser — parce qu’on entend parfois que l’urbanisme temporaire ça ne sert à rien — qu’il y a de la vacance qui va être chronique et ça me semble super de s’appuyer dessus, notamment pour répondre à des urgences sociales, pour faire de l’hébergement d’urgence par exemple. C’est donc super que des acteurs de l’ESS capitalisent sur la vacance et sur le temporaire pour créer des modèles de propriété partagée, même temporaires. Il ne faut donc pas céder à la tentation d’opposer ces deux modes de faire.
La meilleure illustration que j’ai sur le sujet, c’est notre rencontre avec l’équipe de Free Riga https://www.freeriga.lv/, l’équivalent de Communa en Lettonie. Ils nous avaient accueillis dans leur nouveau lieu, Tallinn Street Quarter https://www.archipop.cz/en/projekt.php?projekt=tallinn-street-quarter. C’était vide et ils faisaient revivre le quartier avec des artistes, de la culture et deux bars. Trois ans après, le propriétaire les a virés, il a réembauché leur staff qui gérait le site, tous les occupants, sauf les deux bars. Il en a d’ailleurs rajouté une dizaine, des bars. Ils ont gardé le théâtre, quand même, juste pour dire qu’il y avait encore un peu de culture… Et c’est devenu le hub pour sortir à Riga. J’y suis revenu quelques années plus tard et quand j’ai pris mon vol du retour dans la brochure de l’avion, on disait que l’endroit le plus cool de Riga, c’était Tallinn Street Quarter. Voilà, cette histoire est presque une caricature. Elle raconte tout le problème de l’éventuelle capture par le propriétaire de la valeur générée par l’occupation temporaire. À Free Riga ils disent que par naïveté, ils se sont « gentrifyed themselves out », c’est-à-dire qu’ils se sont « autogentrifiés et fait jetés dehors ». Donc clairement, cela pose la question de la propriété. Une autre histoire intéressante, c’est celle de Yes We Camp à Foresta à Marseille. Le propriétaire a acheté le site pour quelques centaines de milliers d’euros, je crois. Yes We Camp a investi plus d’un million dans le projet, en plus de déployer des efforts colossaux sur le terrain par leur travail. Et puis un jour, il y a rupture de contrat et tout revient au propriétaire. Ce sont des histoires parlantes sur le sujet de la propriété et de la capture de la valeur.
La spécificité de Communa est que nous n’avons occupé presque que des bâtiments publics ou appartenant à des foncières solidaires. Donc, cette question de captation de valeur par un privé, de gentrification par la propriété, elle ne se pose pas de la même manière. Dans ce cadre, faire de l’urbanisme transitoire dans des bâtiments publics qui vont rester publics et améliorer la programmation qui va suivre, nous permet d’éviter ce genre de problématique et d’avoir vraiment un impact très positif dont on peut être fiers.
Donc, oui, clairement, il se passe quelque chose en ce moment en Europe chez tous les collectifs autour des enjeux de pérennisation. C’est quelque chose de générationnel aussi. Communa est née en 2013. Free Riga, Plateau Urbain, Yes We Camp sont aussi nés en 2013. Il est possible d’en citer d’autres, les Allemands AlteMu. Ce sont des collectifs de différents horizons, de l’immobilier, de l’architecture, de l’urbanisme, de la fête, du squat, de l’art, mais nous avons un parcours similaire. Nous avons tous eu besoin d’espaces ou d’en fournir à d’autres. Et nous avons suivi un parcours hors de la propriété et nous sommes donc tous arrivés aux mêmes limites. Et donc, que l’on soit au Québec, à Riga, à Bruxelles ou à Rome, à un moment, nous sommes tous confrontés à la même question. Et d’ailleurs tous ces collectifs sont en train de créer leur outil foncier : Plateau Urbain avec Base Commune, Yes We Camp y réfléchit, Communa nous développons Fair Ground Bruxelles, même Entremise Entremise est une entreprise canadienne spécialisée dans l’occupation temporaire : https://entremise.ca/ au Québec ils souhaitent créer une « fiducie d’utilité sociale » Une fiducie d’utilité sociale est un dispositif mis en place depuis 1994 au Québec et intégré au code civil qui permet de conférer des devoirs de gestion sociale d’un bien par un fiduciaire dans le cadre d’une mission d’intérêt général : https://tiess.ca/projets/fiducie-dutilite-sociale. À Londres, MeanWhile Space, créé 10 ans avant nous, a suivi le même parcours. Aujourd’hui ils ont racheté leurs lieux avec l’équivalent d’une coopérative. Donc oui, nous sommes tous dans la même situation.
En définitive, ce que l’on veut tous, ce qui nous rassemble tous, peu importe que l’on soit squatteurs, occupants temporaires, acteurs de l’ESS, c’est le droit d’usage. Voilà, on veut l’usage. Mais la propriété se met au travers du chemin de certains usagers. Elle favorise les usages qui peuvent extraire le plus de jus. Peut-être que notre rôle est de créer un imaginaire autour d’une propriété collective ou d’une post-propriété, peu importe. Il faut arriver à raconter cette histoire qui peut avoir l’air un peu technique, un peu complexe, pour que les gens s’intéressent à ces questions de propriété collective et aux enjeux qu’elle soulève. Et je crois que c’est notre travail, à Communa et aux autres collectifs que j’ai cités, de raconter cette histoire. Je veux dire, comment on met en récit ce que nous sommes en train de construire, c’est-à-dire des propositions juridiques et institutionnelles pour faire du foncier anti-spéculatif pérenne pour des tiers-lieux. Comment le raconte-t-on pour intéresser les citoyens et les gens qui ont envie d’investir ? Un cinéma que tout le monde adore, des terres agricoles à sortir de la spéculation, les gens veulent soutenir. Si tu dis, « j’ai un outil foncier qui me permet de faire du tiers-lieu », les gens se disent que c’est obscur. Après, les choses bougent, par exemple la foncière Bellevilles, ils sont en train de lever 2 millions d’euros, rien qu’avec des citoyens. Et ils ne sont pas les seuls. Donc, ça peut marcher aussi.
Peut-on revenir plus précisément sur cet outil foncier sur lequel Communa a travaillé ? En quoi est-ce qu’il permet de repenser la propriété et les usages des lieux ?
La rencontre avec le Community Land Trust Bruxelles, le CLTB, nous a permis de réfléchir à la pérennisation de l’usage de nos lieux. Nous voulions réfléchir à un outil foncier qui nous permette de rester dans les bâtiments, au terme de l’occupation temporaire. Nous nous sommes associés au CLTB pour créer une autre structure nommée Fair Ground Bruxelles. Comme le CLTB est cadenassé par des contrats de gestion publique qui les obligent à faire un certain type de logement, mais pas forcément de lieux d’activité, ils ont eu envie d’avoir les mains plus libres. Nous, Communa, nous sommes un bon poisson-pilote puisque nous trouvons des projets qui sont hors marché et qui parfois sont mis en vente. Ensemble, avec d’autres acteurs de l’économie sociale, du sans-abrisme, du logement, nous avons créé en 2019 Fair Ground Bruxelles. Fair Ground grandit bien, aujourd’hui il y a un patrimoine d’environ 75 logements et plusieurs lieux d’activité et d’autres projets en développement.
Le principe de Fair Ground, c’est un Community Land Trust, donc une séparation sol-brique avec une fondation qui détient le terrain, une coopérative propriétaire des immeubles, qui loue des baux emphytéotiques avec des clauses pour plafonner les prix et s’assurer que les cessions de baux se fassent sans plus-value, ou en tout cas avec une plus-value très limitée. Fair Ground lève de l’argent privé aux citoyens et aux institutionnels, à des taux relativement bas. Nous avons juste créé un objet, finalement assez simple en droit, un véhicule coopératif, une fondation qui fait des emphytéoses, des droits d’usage de 99 ans, qui sont reconductibles. Voilà, tout le monde peut le faire. Et la question, c’est plutôt comment tu vas chercher des financements. Ce que nous avons fait pour Fair Ground, c’est de s’allier à dix autres structures dont les équivalents sont Emmaüs, Groupe Aurore, et autres en France. Ce sont des structures qui ont une crédibilité importante et un réseau de donateurs. Je ne dirai pas que le projet foisonne, mais nous avons levé plusieurs millions et ça continue sans devoir proposer aux investisseurs un rendement particulièrement intéressant. Donc ça marche !
Nous nous sommes appuyés sur le CLTB pour lancer Fair Ground, mais il y a beaucoup d’autres initiatives qui nous ont inspirés avant de le créer. On connaissait le Mietshäuser Syndikat en Allemagne, qui a été créé pour empêcher la revente des biens achetés en commun. Le Mietshäuser Syndikat fonctionne avec une société anonyme qui est propriétaire à 51 % des habitats dont les membres sont les membres du Mietshäuser Syndikat. Ils disposent d’un droit de veto systématique à la revente. C’est un modèle très intéressant. Là où il pêche, c’est qu’il semble s’adresser plutôt à des activistes de classe moyenne qui sont quand même en capacité de mobiliser le capital de départ. En termes d’usages par contre, le Mietshäuser Syndikat, permet qu’il y ait aussi des lieux d’activité, donc c’est un assez mixte à ce niveau-là. Les coopératives d’habitat en Suisse nous ont aussi beaucoup inspirées. Je suis allé en visiter à Genève et à Zurich, en résumé tu es coopérateur, donc propriétaire de la société qui est propriétaire de ton logement, et toi tu es locataire de ton logement. Le sol appartient généralement à la ville via une emphytéose. Dans ces coopératives il y a souvent des locaux d’activité au rez-de-chaussée, un théâtre, un cinéma, une maison de naissance… il y a de tout. Et enfin un dernier modèle inspirant pour nous, ce sont les fiducies au Canada. Là, il y a vraiment une réinvention un peu plus profonde de ce que j’ai bien compris en termes juridiques d’un autre rapport à la propriété. En France, le mouvement des OFS prend beaucoup d’ampleur, c’est encourageant !
Quels sont les freins identifiés et les leviers d’action pour explorer d’autres formes de propriété collectives et alternatives pour les tiers-lieux ?
Il y a des enjeux économiques, évidemment. C’est le nerf de la guerre. Pour financer Fair Ground, il nous faut des philanthropes au grand cœur ou des capitalistes qui veulent donner du sens à leurs investissements. Ou des dispositifs publics, et ça, c’est la quatrième étape du processus. Après une phase de hack de la propriété avec des modèles alternatifs, ou communs, il faut institutionnaliser. Il y a donc deux manières de voir les choses, jouer avec l’existant ou construire des alternatives. Avec les dispositifs existants, qu’est-ce qui peut être mis en place ? Il existe déjà un arsenal vaste pour faire des crédits à 0 %, des garanties bancaires publiques. À Genève, presque 10 % de la ville est en propriété coopérative, à Zurich c’est quasi 30 %, à Vienne, encore plus. Ils ont mis en place une série de dispositifs publics qui ne sont pas délirants, qui rapportent même à terme. Mais pour les instaurer, il faut sortir d’une vision court-termiste ultralibérale à la Thatcher, où on se débarrasse des logements sociaux pour renflouer les caisses maintenant, mais on se retrouve 30 ans plus tard à les racheter à 10 fois le prix à la pièce et à subventionner le privé. Ce sont donc avant tout des choix politiques.
L’autre manière de voir les choses qui est plus anarchiste ou créative, ce serait de travailler à la mise en place d’alternatives à la propriété. Les formes de propriété alternative, nous les avons vues, mais les alternatives à la propriété, c’est un autre chantier qui est d’ordre philosophique, avant d’être juridique. Comment repenser la propriété, ou s’en débarrasser, imaginer d’autres formes de détention, de possession ? On peut aussi penser la propriété pas seulement comme un droit, mais aussi comme un devoir. Et ça aussi, ça existe déjà. Même si ça reste très symbolique, en Belgique, le législateur a modifié le Code civil il y a quelques années pour redéfinir la propriété, non plus comme le droit le plus absolu, mais aussi comme un devoir à l’attention des tiers. C’est déjà le cas en Allemagne depuis longtemps. Il y a donc beaucoup de propositions autour de ce qui se fait sur les communs aujourd’hui, qui permettent de repenser la propriété à travers un autre prisme. C’est essentiel, surtout pour le foncier, qui est une ressource rare, il est temps de repenser cette notion-là.
Et en réalité, ce ne sont pas les propositions qui manquent. À nous de nous en saisir !

Cet article est publié en Licence Ouverte 2.0 afin d’en favoriser l’essaimage et la mise en discussion.